Everest (Tibet)

Bien qu'aujourd'hui « région autonome », le Tibet envahi en 1950 est toujours annexé par la Chine.
De notre point de vue, les Tibétains sont vraiment un peuple à part entière (culture, langue et apparence totalement différentes) qui mériterait d'être libre et indépendant s'il le désire... Nous sommes solidaires vis à vis d'une cause qui nous apparaît justifiée !! C'est dit !

Enfin notre longue escale à Katmandou pour la préparation de l'Everest prend fin, nous reprenons les vélos et filons tout droit direction le Toit du Monde.

Très vite, nous entrons dans le vif du sujet avec un véritable « mur » : « la plus longue montée du Monde » puisqu'après être redescendus aux environs de 500m d'altitude, la route va s'élever progressivement jusqu'à 5200 m... Belle grimpette !!! (l'équivalent de 3 Mont Ventoux pour les connaisseurs et sur de la piste défoncée...)
On attaque par une jolie vallée encaissée à la végétation luxuriante du côté népalais jusqu'au Pont de l'Amitié, faisant office de frontière avec le Tibet. Les paysages vont alors progressivement changer avec l'altitude et l'arrivée du froid et de la neige.



Peu avant Nyalam (3700m), il n'y a plus trace d'arbres et les immenses étendues désertiques prédominent en plus de la neige présente sur les premiers sommets qui commencent à apparaître...
L'air se faisant de plus en plus rare et le froid de plus en plus intense, nous avons quelques difficultés à nous adapter à ce brusque changement de décor, le Tibet !



Au milieu de nulle part à près de 4500m, Cyril est frappé par une brusque crise de paludisme et c'est avec peine qu'il parvient à continuer jusqu'à une première maison au beau milieu de ces paysages lunaires. Malgré la barrière de la langue, nous sommes accueillis chaleureusement chez ce drôle de peuple vivant dans les conditions les plus extrêmes à près de 5000 m : les Tibétains.

A cette altitude, il est bien difficile voire impossible durant l'hiver de faire pousser quoique ce soit et ils doivent le plus souvent se contenter d'une poudre blanche qu'ils mélangent avec de l'eau : la Tsampa !! Aucun goût ou presque, ce sera notre alimentation principale chez toutes nos « familles d'accueil » et on ne peut pas dire qu'on en raffole... A vrai dire, on n'a pas trop le choix : les hôtels et les « guest house » n'existent pas en dehors des grandes villes et l'on peut s'estimer heureux de trouver ces petits villages nous permettant d'avoir un abri et de nous ravitailler en eau comme en carburant (Tsampa...)

Comme d'habitude, nous sommes partis « légers » et peu organisés et devons notre « salut » qu'à la générosité des gens ! Mais depuis le début, cela nous a bien réussi et surtout permis de découvrir et partager un petit bout de leur vie... Une expérience et surtout un bonheur inestimable !!! Nous leur devons tant !!!



Chaque matin, nous les quittons pourtant, attirés comme des aimants vers notre dernier rêve qui se rapproche... Les paysages sont de plus en plus féériques avec les géants éternels qui nous entourent et nous font presque oublier notre fatigue amplifiée par une « énième » gastro-entérite probablement due à nos dernières expériences culinaires... On s'accroche et basculons enfin le Tang La Pass (col) à 5200 m, le plus haut de notre aventure à vélo.
C'est « gigantesque », nous sommes entourés de sommets enneigés de plus de 7000 m, voire plus, tel le Shishapangma (8050m).



Nous plongeons dans une courte descente qui nous mène sur les hauts plateaux du Tibet où une belle surprise nous attend : la première vision de celui qui nous fait tant rêver depuis notre départ de Mormoiron, « la ligne d'arrivée » programmée de notre périple : le Toit du Monde.
Il est encore loin à l'horizon mais à présent nos regards ne cessent de se tourner vers ce dernier défi de taille.


Après Tingri, dernière attache à la civilisation avant d'entrer définitivement dans le royaume de l'hymalaya, nous prenons un raccourci plutôt sinueux (champs de cailloux, passages de rivières...) avec notamment le Cho Oyu (8200 m) au-dessus de nos têtes.

Cette dernière portion de 80 km sera l'une des plus dures mais aussi des plus sauvages et dépaysantes puisque nous voici seuls au beau milieu de l'immensité de la plus haute chaîne de montagnes au monde. Notre progression se fait lente à plus de 5000 m et nous avons beaucoup de chance de trouver refuge dans une maison tibétaine, on n'y croyait plus !





Le lendemain, 7 avril, nous entamons le coeur léger la dernière journée de vélo de ce tour du monde entamé près de 2 ans auparavant. Après une superbe descente type VTT où nous lâchons les freins, nous regagnons la piste principale pour à peine une quinzaine de km jusqu'à l'Everest. Clément ne peut s'empêcher de s'offrir une dernière crevaison, bouclant ainsi un record impressionnant..

Au fur et à mesure que nous remontons cette vallée, le « monstre » en ligne de mire se fait de plus en plus gros et l'émotion de plus en plus forte. Après avoir passé le Monastère de Rongbuk, puis une dernière côte avec un vent de face violent dans la dernière ligne droite, c'est presque les larmes aux yeux que nous rejoignons le camp de base de l'Everest.





C'est fini, notre objectif de rejoindre le Mont Ventoux (Toit de Provence) à l'Everest (Toit du Monde) est réalisé après 24200 km sur les 5 continents.

Le Camp de Base Chinois (BC) situé à 5200 m est une véritable petite ville durant les deux mois de la saison de l'ascension. Environ un millier de personnes sont là cette année avec de grosses « expéditions » commerciales comme les américains de Discovery Chanels ou les russes de Seven Summit ainsi qu'un énorme contingent de chinois faisant des essais « top secrets » en vue d'élever la flamme olympique l'an prochain.

Quant à nous, faute de gros moyens, nous nous sommes greffés à une « expé » plutôt bon marché, « Monterosa », où nous côtoyons des gens de diverses nationalités..

Depuis quelques années, le Versant Tibétain, deux fois moins cher que le versant Népalais (permis d'ascension moins élevé) est reconnu comme étant un vaste cirque avec des gens tentant des projets innovants voire loufoques ainsi qu'une ribambelle de novices de la montagne tentant malgré tout leur chance (certains n'ont jamais vu la neige...)
Sachez que nous faisons partie de la troupe car en plus d'être venus intégralement en vélo depuis l'Océan Indien et de notre style hippie qui ne passe pas inaperçu, nous avons acheté un parapente d'occasion à Katmandou avec l'espoir peut-être de s'offrir le plus haut vol du monde....



Deux canadiens, trois polonais et un sud-africain, nos « partenaires » sont arrivés sur les lieux depuis quelques jours (cela va plus vite en 4X4). Nous ne grimpons pas toujours ensemble car chacun est autonome mais l'ambiance est plutôt bonne car une activité va nous rapprocher : les cartes !!! Le Macao (jeu polonais), le Grand Dalmuti (hollandais), le Rami ou notre jeu bien de chez nous, la Couinche, vont être nos activités principales durant ce mois et demi ici (sans rire !!!).

Si pour beaucoup, l'Everest est synonyme de vie en conditions extrêmes et d'ennui, pous nous, c'est presque des vacances puisque la nourriture est au-dessus de nos espérances et les périodes de repos et d'acclimatation sont plus nombreuses que celles des marches....

Après une petite semaine de repos au BC (camp de base) où nous laissons nos vélos, nous rejoignons doucement à travers la moraine (à pied donc à partir de maintenant), le CBA (camp de base avancé) situé à 6400 m. La majeure partie du matériel est acheminé par les yacks qui cheminent à côté de nous. Grâce à notre relative prudence pour une fois puisque que l on sy rend en 3 jours, nous passons facilement ce premier pallier (22 km) alors que certains ont déjà des maux de tête abominables voire des oedèmes et doivent redescendre au plus vite (parfois déjà jusqu'à Katmandou...).





Nous poussons même un peu plus haut avec un aller / retour au terrible Col Nord qui culmine à 7050 m. Ces pentes verglacées de 60 à 70 % seraient délicates à négocier s'il n'y avait pas ces cordes fixes installées par les sherpas de 6700 m jusqu'au sommet. C'est notre première sortie sur glace et en crampons depuis l'Amérique du Sud et on s'en sort plutôt bien puisque Cyril rattrape le sherpa avant le Col alors que Clément parvient à y hisser son parapente de plus de 10 kg... Notre record d'altitude (Aconcagua : 6960 m) est déjà dépassé, et ce n'est pas fini...



Nous y déposons notre matériel sans même monter la tente et en deux jours, redescendons rapidement au CB à 5200 m. La « Règle » veut qu'après chaque effort en altitude et pour récupérer, il faut redescendre sous les 5800 m car au-dessus, ce n'est pas possible (sauf pour les sherpas qui eux sont capables de rester deux mois à plus de 6400 m...).

Après une semaine de repos (et les cartes !), nous repartons « gonflés à bloc » et rejoignons le CBA (6400 m) en une seule journée (au lieu de deux la première fois avec un camp intermédiaire à 5800 m), car nous sommes à présent bien acclimatés à ces altitudes. Cyril réalise même un temps « canon » en 4h11 mn, se payant le luxe de courir à plus de 6000 m (les sherpas du groupe n'en reviennent pas !). On est en forme...

Passang, notre sherpa l'est beaucoup moins lui puisqu'il a la gorge prise et une toux persistante depuis plus de dix jours. « Fier », il refuse de redescendre pour se soigner et nous assure qu'il va aller mieux mais les jours passent et son attitude va nous conforter dans l'idée qu'il est bien malade, mais que les symptômes sont surtout ceux de la « flemmingite aigüe » plus qu'autre chose...

Pour parfaire notre acclimatation, nous remontons au Col Nord (7050 m) et allons y passer deux nuits « exécrables » (impossible de fermer l'oeil ???) entrecoupées d'un aller / retour au camp 2 à 7600 m. Là encore, malgré une chaleur suffocante et très surprenante à une telle altitude, Clément parviendra à porter la voile et la déposer tandis que Cyril est toujours aussi à l'aise et « se tire la bourre » avec des sherpas ainsi qu'avec Marc, un franco-canadien du groupe qui est en forme lui aussi...



Pour nous, la phase d'acclimatation se termine et nous redescendons au CB pour une dizaine de jours de repos avant l'assaut final.

Durant cette période, nous passons le plus clair de notre temps chez nos amis et compatriotes de Jomolangma (site internet : www.jomolangma2007.com) à jouer à la couinche et grignoter des produits du terroir qui nous ont drôlement manqué pendant deux ans, tel le jambon cru, le fromage, le pain ou le nougat... Vive la France, on se sent presque déjà de retour !!!



Nous faisons régulièrement le tour des tentes voisines avec notamment nos amis de Monaco et les indiens chez qui nous prenons le thé, c'est sympa...



Avec l'agence Monterosa, une expé hollandaise (s'étant acclimatée par un trekking dans le Langtang) vient de nous rejoindre et un personnage en particulier est plutôt intéressant : Wim Hof alias « Iceman » (l'homme de glace »). Cet hollandais est très connu dans son pays par divers records du monde de résistance au froid (plus d'1 heure dans un bac empli de glaçons, 5 mn 30 en apnée sous la glace polaire...) Site internet de l'expédition : site internet de Wim : www.innerfire.nl



Cette année, il tente tout simplement de grimper l'Everest seulement vêtu d'un short, et même s'il a échoué à 7400 m (record du monde tout de même ), sa performance est impressionnante...
Inutile de vous dire que nous nous sommes plutôt bien entendus et qu'un projet commun complètement fou est peut-être en train de voir le jour, affaire à suivre...



Début mai, nous remontons au CBA pour la dernière fois mais les conditions climatiques vont nous contraindre à attendre quelques jours, pas génial car à 6400 m, on se fatigue même sans rien faire.

Le sherpa, toujours aussi feignant, a sous-loué des amis pour monter les camps d'altitude et l'oxygène à 8300 m. C'est son histoire, l'important est que tout soit prêt.

On nous annonce une météo « parfaite » dans les prochains jours (un grand merci à l'équipe de Jomolangma qui nous a régulièrement donné des infos « Météo France », service qui fait défaut à Monterosa...)

Le 16 mai, nous nous élançons tranquillement en direction du Col Nord avec des sacs bien chargés (plus que le sherpa qui en plus se paie un porteur tibétain jusqu'au glacier...)
Une mauvaise surprise nous attend là-haut puisque notre tente a tout bonnement disparu ???
Totalement ensevelie sous la neige et inutilisable, c'est bien la preuve que Passang n'est pas venu ici souvent ; après avoir creusé pour récupérer nos affaires, nous empruntons une tente voisine apparemment libre... Toujours au top de l'organisation, nous avons oublié les couverts et c'est au piolet que l'on ouvre les boîtes de conserve, il y en a partout...



Le lendemain, c'est en compagnie de Denis, Olivier, Isabelle et Sylvie, nos potes français que nous ré-escaladons jusqu'au camp 2. La vue panoramique est magnifique entre les sommets innombrables, les différents camps en contrebas et là-haut le Toit du Monde qui semble si proche.

A partir de cette altitude (7600m), la plupart des grimpeurs utilise l'O2 artificiel mais Cyril, en « puriste », décide de s'en passer, du moins le plus longtemps possible.



Le 18 mai, nous changeons un peu de terrain puisqu'à présent, nous ne sommes plus sur du glacier mais sur la Pyramide Rocheuse où l'on évolue en mixte (neige – roche) mais c'est toujours aussi raide ! La météo s'est trompée puisqu'il neige à présent en abondance...
Notre progression est assez lente car même avec l'O2, Clément a du mal avec le parapente et Cyril est totalement dans l'inconnu aux alentours de 8000 m. N'ayant aucune expérience, on en garde sous le pied car l'épuisement voire un oedème est vite arrivé dans cette « zone de la mort ». Après un dernier tronçon difficile, nous atteignons le camp 3, perché à 8300 m, en fin d'après-midi. Pas question de dormir (et de ne plus se réveiller...), nous restons juste 3/4h dans ce refuge de fortune puisque la tente est là aussi cassée et totalement dans la pente si bien qu'on n'ose pas bouger de peur de dégringoler... On s'efforce de se faire à boire (faire fondre de la neige) et de grignoter un peu tandis que le sherpa brille par son absence car il « s'amuse » avec des confrères dans une autre tente.






22h, le Grand Départ ! Il fait nuit sur l'Everest quand nous nous préparons puis nous élançons à l'assaut du Toit du Monde.
Clément a toujours son aile sur le dos et Cyril continue de n'utiliser que l'air ambiant que lui propose la montagne, se retrouvant seul au beau milieu de drôles de cosmonautes...
Le froid (environ - 25 à – 30°) est supportable sur ce début d'ascension et nous suivons la corde fixe sans rien voir de ce qui nous entoure.

Mauvaise surprise, après 1h de progression plutôt rapide, la lampe de Cyril rend l'âme subitement, le laissant dans le noir le plus total alors qu'il ouvrait la voie. En se mettant derrière Clément et grâce à la corde, il est possible de continuer tant bien que mal mais c'est vraiment la poisse ! (même problème lors de la Diagonale des Fous à la Réunion). Et ce n'est pas fini car un peu plus tard, c'est au tour de Clément de connaître le même sort et c'est dans le crépuscule de la nuit que nous poursuivons désespérément accrochés à cette corde qui nous montre le chemin. L'itinéraire est de plus en plus sinueux et enneigé jusqu'à la crête et les glissades sont nombreuses alors qu'on s'enfonce dans la neige...

Une fois sur l'arête summitale à 8450 m, nous sommes à découvert et le froid se fait sentir, glagla... !!! On prend le temps de se couvrir et de boire un coup tandis que nos amis français et monégasques nous rattrapent et nous dépassent (on n'aura plus à faire la trace !!!)

La suite est presque plus « facile » puisque nous longeons la crête plutôt « roulante » si on excepte les 3 « steps » qui font office d'ultimes obstacles..
Mais avec ce petit vent venant du Népal, Cyril commence à sentir ses extrémités lui échapper et malgré de surprenantes bonnes sensations à cette altitude avoisinant les 8500 m, il décide de ne pas prendre de risques (déjà plusieurs petites gelures 1er degré à la main droite..) et récupère la bouteille d'oxygène de réserve que lui portait le sherpa au cas où ...
L'oxygène le réchauffe totalement et il incite Clément à poser son lourd fardeau car de toute évidence, il n'est pas au mieux... Même à bas débit (1,5 l /mn) l'O2 artificiel change totalement la donne et, euphorique, Cyril perd un peu les pédales et redouble rapidement quelques « échappés » jusqu'au 1er step où, pas le choix, il lui faut faire la queue, 30mn d'attente et l'occasion de reprendre ses esprits car il s'est juré de jouer la carte de l'équipe et de terminer ensemble là-haut.

Clément, en difficulté, finit par arriver en compagnie du sherpa tandis que le jour se lève aux alentours de 4h du matin. Nous franchissons le 1er step et sommes alors à une altitude proche de 8600 m lorsque Clément, « complètement à bout » annonce qu'il ne peut plus continuer. Cyril, déboussolé, pense d'abord continuer seul mais finit par se raviser. Malgré un magnifique lever de soleil, le vent est de plus en plus fort et un nuage lenticulaire entoure l'Everest. Pour la première fois peut-être depuis le début du voyage, il hésite ! Nous allons rester de nombreuses minutes à tergiverser ici, le Toit du Monde à portée de main ou presque (on voit aisémment une personne sur le sommet faisant des signes...)

C'est fini, notre aventure s'achève donc ici, sur le Toit du Monde tout de même mais malheureusement pas en son point le plus haut, il nous a manqué 250 m. .....



Finalement, cette sagesse qui nous a souvent fait défaut l'emporte et c'est ensemble que nous faisons demi-tour mais on n'est pas encore sortis d'affaire car l'arrivée, la vraie, elle est en bas! (une anecdote : les dents de sagesse de Cyril ont poussé pendant la montée de l'Everest... un signe !!!).

Clément est totalement cuit et c'est presque en pleurant et sans s'assurer qu'il descend le premier step; la descente s'annonce longue et laborieuse et Cyril propose alors « d'abréger nos souffrances » en essayant de s'échapper par la voie des airs en décollant depuis la crête. C'est un peu du « ça passe ou ça casse » mais à cet instant, cette idée semble plus facile, voire plus sûre que de descendre à pied tant la fatigue est grande.

Il fait bien jour à présent et avec le Népal d'un côté et le Tibet de l'autre, nous avons une vue imprenable sur les deux pays et quelques géants tel le Makalu tandis que les « petits » 7000 m nous paraissent de vulgaires collines.

Nous restons pas loin de 3h ici , à 8450 m, tout d'abord assis à attendre une brise qui tardera à venir puisque le vent est totalement tombé, chose rarissime sur l'Everest. Nous déplions la voile finalement et allons tenter de quitter cette magnifique montagne qui n'en est pas moins un cimetière (plus de 200 cadavres recouvrent la montagne..). Pour la petite histoire, sachez qu'un cadavre sera retrouvé sous un rocher par la suite au pied de la voile par notre ami Denis qui s'inquiétait pour nous...



Clément, le pilote, est épuisé et les conditions « douces » ne nous avantagent pas car il faut alors beaucoup d'énergie pour soulever la voile et surtout courir assez rapidement pour décoller. Malgré plusieurs essais et l'aide du sherpa, nous ne réussirons qu'à tomber dans la pente et finirons par jeter l'éponge car Clément arrive au bout de son oxygène (Cyril ne l'utilise pas durant toute cette période..). Il faut descendre, et vite... Sans s'en rendre compte, on s'est encore affaibli car le simple fait de rester à 8500 m vous pompe de l'énergie. Impossible de plier et ne se sentant pas de porter le parapente à la descente, on l'abandonne ici (c'est ainsi que Denis le retrouvera en compagnie de cet occupant que l'on a piétiné sans le savoir...)



Epuisés, notre cheminement se fait parfois en glissant sur les fesses et Clément a recours a de longues pauses pour reprendre son souffle. Peu avant le camp 3 (8300 m), grosse frayeur, Clément tombe d'un seul coup et se retrouve allongé sur le dos, dans la neige. Il est arrivé au bout de sa deuxième bouteille d'O2, la dernière et se retrouve alors en hypoxie, c'est-à-dire quasiment en apnée car il l'utilisait à haut débit depuis de nombreuses heures...

Le sherpa, très peu convaincant jusque là, comprend vite la situation et lui sauve la vie en lui donnant sa bouteille personnelle ; « le souffle de la vie » pour Clément qui se rétablit petit à petit...
Un instant après, c'est le sherpa lui aussi « dopé à l'O2 » depuis des heures, qui pose un genou à terre et reste immobile quelques minutes, apparemment très marqué. Mais probablement, grâce aux caractéristiques particulières de ce peuple génétiquement adapté à l'altitude, il parvient à se reprendre et rejoindre le camp où l'attendent de nouvelles bouteilles d'O2. On a eu chaud !!!


(ps: sur la photo ci-dessus, 8300m, on peut apercevoir juste derrière Cyril que Clément a "les 4 pattes en l'air" et en fond, un malheureux Tchèque qui lui ne se relèvera plus...)

Nous n'y traînons pas car dans notre état, dormir à cette altitude serait suicidaire. Malgré la fatigue, nous poursuivons très lentement jusqu'au camp 2 à raison de 10 à 20 mètres, entrecoupés de longues pauses car Clément est complètement au bout du rouleau et halète dangereusement. Le sherpa, lui, a peur pour sa vie et file sans nous attendre car il commence à être aveugle.. A ce rythme de fourmis, nous perdons tout de même de la hauteur gagnant ainsi de l'oxygène et parvenons à rejoindre le camp 2 à 7600 m où nous passons une nuit « plus morts que vifs » et sans véritablement dormir.

Chargés comme des mules pour redescendre un maximum d'affaires, c'est encore très péniblement que nous en terminons avec le glacier, soulagés d'avoir à nouveau « les pieds sur terre » et surtout d'être sains et saufs car sur cette montagne, ce n'est jamais gagné d'avance...

Evidemment les regrets sont là et resteront car le sommet nous a échappé pour si peu mais nous avons probablement été trop « gourmands », notamment avec le parapente...
La montagne a fini par avoir le dernier mot, c'est la vie !!!



Malgré tout, nous sommes vraiment ravis et fiers de notre escapade autour du monde et de ses montagnes avec des moyens et une expérience très limités.
On s'est régalé !!!

Merci à tous les partenaires, bienfaiteurs, amis, familles et tous ceux qui nous ont aidé et suivi pendant ces deux années...

Merci aussi à tous pour l'accueil que vous nous avez offert lors de notre retour à Mormoiron....